18 juin 2022

Mort de Jean-Louis Trintignant : le cinéma français rend hommage à l'acteur

La disparition de Jean-Louis Trintignant, figure emblématique du cinéma et théâtre français, n’a pas laissé le monde du septième art insensible. Nombreux ont été ceux qui ont rendu hommage à l'acteur, qui après un long combat contre la maladie, s’est éteint, ce vendredi 17 juin, à l’âge de 91 ans.

Après l’annonce de son décès, son ex-épouse, la réalisatrice Nadine Trintignant, lui a rendu un hommage poignant sur BFM TV. "C'était quelqu'un de rare, de déroutant dans le bon sens. Un immense comédien qui travaillait toute sa vie avec son magnétophone à la main. (...) Il a fait des grands films. Il aimait rire. Il était joyeux." Mariée par la suite au réalisateur Alain Corneau, Nadine Trintignant n’a pas pour autant oublié son premier mari et père de ses trois enfants. Malgré leur séparation, la pair était restée proche. "Ça ne m'empêche pas d'aimer toujours Alain Corneau bien sûr, mais quand on aime quelqu'un, on l'aime pour la vie. On est amoureux, ça ne dure pas, mais on aime pour toujours. Jean-Louis comme Alain, ce sont des hommes que j'ai aimé pour toujours." Une relation inoubliable, pourtant liée par le drame. "Je l'ai connu entre ses 22 ans 38 ans, 40 ans, je ne sais plus, c'était la jeunesse. Il y a eu des fêlures évidemment, on a perdu nos deux filles. C'est des fêlures dont on ne se défait jamais." 

Toujours sur BFM TV, Gilles Jacob, ancien président du Festival de Cannes, a quant à lui tenu à mentionner "l’élégance morale autant que physique" de Jean-Louis Trintignant. "C'était quelqu'un de petite taille mais qui avait une telle force de jeu, une telle justesse de ton, une telle fragilité, avec en même temps un sourire, et la voix de Trintignant, on s'en souviendra toujours." Invité de France Inter ce samedi, il a continué : "Il se trouve que Trintignant a fait le meilleur film de chaque metteur en scène. Dès qu'il a touché à quelque chose, c'était bien. Ses films étaient complètement non conformistes, originaux, burlesques, très drôles, qui n'ont pas eu le succès qu'ils auraient du, du coup il a tout arrêté."

Gilles Jacob était accompagné de Claude Lelouch, réalisateur de Un homme et une femme, dans lequel Jean-Louis Trintignant a donné la réplique à Anouk Aimée. Le film a reçu la palme d'or du festival de Cannes 1966, l'Oscar du meilleur film étranger en 1967 ainsi que celui  du meilleur scénario original. Lelouch lui fait le portrait d'un acteur qui ne trichait pas. "J'ai trouvé chez Jean-Louis ces parfums de vérité qui donnent un sens à la vie. La vie est un jeu extraordinaire, merveilleux, mais il faut détecter les tricheurs. Jean-Louis n'en était pas un. Il y avait chez lui les nuances, car dans la vie, rien n'est blanc ou noir." Le cinéaste poursuit et raconte comment, en 2019, l'acteur avait cessé de croire en lui. "Il pensait que son visage allait faire peur aux gens, qu'il allait être en retrait par rapport à tous les cadeaux qu'il nous avait fait jusque-là. J'ai réussi à le convaincre, il a mis beaucoup de temps à se convaincre lui même. Mais il fallait aller très vite, il avait des hauts et des bas terribles."

Egalement interrogé sur RTL, Claude Lelouch confie que Trintignant a été le premier acteur à lui dire "oui". "J’ai tourné sept films avec lui et sept fois il m’a offert son talent. Parmi les plus grands, c’était l’un des plus grands." Ce qui l'a marqué : sa voix, "la plus belle que l’on ait jamais entendu au cinéma et au théâtre. ll ne parlait pas, il chantait. Dès qu’il disait un mot, on écoutait. On était fasciné, hypnotisé. Il rendait les choses crédibles. Dès qu’il interprétait un rôle, on y croyait, il était dans la vérité. Il a partagé avec nous ces souffrances et il l’a transformé dans son jeu."

Antoine Sire, qui jouait le fils de Jean-Louis Trintignant, à l’âge de cinq ans, dans Un homme et une femme s’est lui aussi exprimé sur Twitter, un post qui parle de lui-même.

De nombreux réalisateurs ayant fait tourner l'acteur ont eux aussi pris la parole, tous témoignants de l'impact de Jean-Louis Trintignant sur le monde du cinéma.

Costa-Gavras, qui a dirigé l'acteur en 1969 dans Z, un thriller politique qui a valu à Jean-Louis Trintignant le prix d'interprétation au Festival de Cannes, s'est exprimé au micro de France Inter : "Il y avait un grand mystère qui l'entourait. Ce mystère persistait et puis, tout d'un coup, il disait quelques mots, il faisait rire et ça devenait un personnage étonnant, un personnage qu'on aimait." Sur France Info, la réalisateur a parlé d'un "grand acteur" et d'un "homme assez étonnant, surprenant" : "J'ai travaillé deux fois avec lui. Cela a été à chaque fois un grand plaisir. (...) Dès qu'il avait lu le scénario, dès qu'on parlait, il était déjà le personnage. C'était assez rare."

Toujours sur France Info, c'est au tour du réalisateur Enki Bilal de saluer l'acteur qu'il a dirigé dans Bunker Palace Hotel en 1989. Il parle d'un "très grand acteur mystérieux qui s'en va, un acteur avec une voix" et d'un comédien de théâtre "qui marque".

Ému et bouleversé, Philippe Labro, réalisateur de Sans mobile apparent (1971) a fait part de son "respect permanent pour son talent et son intelligence".

Mentionnant un homme "hors du commun, qui va nous manquer", Alexandre Arcady se souvient également du comédien avec qui il a travaillé sur Grand pardon (1982) : "J'ai eu plaisir à tourner avec lui, comme vous pouvez l'imaginer ! J'étais un jeune metteur en scène.  "à un grand premier violon dans un orchestre" : "Il jouait à la perfection, sans outrance."

Côté reseaux sociaux, l’Académie des Arts et Techniques du cinéma a bien évidemment réagis à la nouvelle sur Twitter. 

Emmanuel Macron a également tenu à honorer "cet immense acteur" qui "avec sa beauté sage et son jeu sobre, sa voix grave et ses pudeurs, (…) donnait à tous ses rôles la profondeur d’une énigme."

Jean Dujardin a quant à lui partagé sur son compte Instagram une photo du comédien, sobrement accompagnée d’un emoji de main jointe et d’un coeur.

Nathalie Baye a elle aussi réagit au décès de l’acteur de légende via son compte Instagram confiant que "son sourire, sa voix, son regard" allaient lui manquer.

Leila Bekhti a quant à elle partagé un tweet du compte de La Cinémathèque Française saluant l’acteur. "C'est l'un des plus grands acteurs de l'histoire du cinéma français qui nous quitte aujourd'hui. Jean-Louis Trintignant, une vie de théâtre et de cinéma, 1930-2022.”

Pierre Lescure, journaliste et président du Festival de Cannes de 2014 à 2022, a publié deux photos de l’acteur avec la mention "Adieu , Cher Jean Louis…". Un tweet notamment repartagé par l’actrice Géraldine Nakache.

Enfin, Jean-Michel Ribes a quant à lui connu l'acteur depuis petit : "C’était un ami de mes parents". Le directeur du théâtre du Rond-Point à Paris est notamment revenu sur le décès de Marie Trintignant : "C’est quelque chose qui à la fois l’a totalement détruit et en même temps renforcé dans une espèce de dignité. Il a voulu rester debout, il a voulu jouer, il a voulu être lui, continuer à avoir cette capacité de charme et d’ambiguïté qui était ce qui le guidait dans la vie. Il n’y pas beaucoup de grands acteurs qui ont été à la fois de grands acteurs au théâtre et au cinéma, il a été ça." Pour lui, le meilleur film de Jean-Louis Trintignant, son plus emblématique, est Z. "Un deuxième Jean-Louis Trintignant, je n'en vois pas."

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire