Parmi ces films qui ont marqué l'Histoire du cinéma, La Liste de Schindler occupe incontestablement une place de choix; figurant même dans le top 100 des meilleurs films de tous les temps, selon la bible hollywoodienne qu'est le Hollywood Reporter.
En 1982. Steven Spielberg triomphe au Box Office mondial avec E.T. C'est aussi cette année là qu'il découvre un ouvrage d'un auteur australien, Thomas Keneally : La Liste de Schindler, traduit en France en 1984.
L'histoire d'Oskar Schindler, industriel nazi convaincu, qui sauvera finalement de la déportation quelques 1300 juifs en engloutissant sa fortune. Une histoire qui le bouleverse et qu'il souhaite adapter au cinéma; mais "ne se sentant pas prêt émotionnellement" -comme il le dira lui-même-, il a longtemps cherché à confier le projet de film à d'autres réalisateurs, avant de se raviser.
D'abord Roman Polanski, qui refuse : cette histoire est trop proche de la sienne, lui qui a réchappé enfant du terrible ghetto de Cracovie, tandis que sa famille fut exterminée à Auschwitz. Spielberg songe aussi à confier la réalisation à Billy Wilder, qui réaliserait là son dernier film. Ou encore Martin Scorsese, intéressé dans un premier temps, avant de décliner l'offre : "ce film doit être réalisé par une personne de confession juive" lui a-t-il dit.
Dans une interview fleuve accordée au site Deadline en amont de la présentation à Cannes de son film ultra attendu, Killers of The Flower Moon, Scorsese revient notamment sur la génèse du film de Spielberg, qu'il a contribué à impulser avec l'aide du (brillant) scénariste Steven Zaillian, à qui l'on doit notamment le script de Gangs of New York.
"Pour La Liste de Schindler, j’avais engagé Steven Zaillian, et nous travaillons tous les deux sur le scénario. J’étais prêt à le réaliser. Mais j’avoue avoir eu des doutes. Nous étions en 1990, je venais de tourner La Dernière Tentation du Christ.
Je me souviens que Spielberg, au fil des années, n’arrêtait pas de me parler du livre. Il me l’avait montré quand nous étions dans l’avion vers Cannes, et il me disait "C’est mon futur grand film, et je vais le réaliser". [...] Et je lui avais répondu "Bien, j’ai La Dernière Tentation du Christ de mon côté, et je vais le faire également.
À l’époque, je n’arrêtais pas de dire "Je ne suis pas juif !" Ce que je voulais dire, c’est que l’histoire devait être racontée par un juif, et je pense que Spielberg était d’accord avec moi. [...] Il m’avait raconté qu’il n’y avait que 200 juifs à Phoenix, là où il ou avait grandi. Je ne pouvais pas le croire. Je viens moi-même de l’Upper East Side, et j’ai grandi avec cette communauté. Je n’étais pas altruiste, cela faisait sens qu’il prenne ce projet en main. J’avais peur de ne pas être à la hauteur sur ce coup".
"Lorsque vous avez vu le résultat final, quelle a été votre sentiment ?" lui demande le journaliste. Scorsese lui répond : "Si j'avais fait le film, ca n'aurait pas été le succès qu'il est devenu. Il aurait pu être bon. j'avais des idées, dont la plupart se retrouvent dans le film [de Spielberg]. J'avais une fin différente. J'ai une grande admiration pour son film".