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22 avril 2024

Arte concocte un programme spécial festival de Cannes bien rempli

Pour patienter jusqu'au festival de Cannes 2024, qui se déroulera du 14 au 25 mai prochains, Arte a planifié la diffusion de plusieurs films acclamés sur la Croisette. Voici les détails.

Les festivités démarreront officiellement le 1er mai, même si quelques films seront déjà en ligne un peu avant, gratuitement en streaming sur le site de la chaîne, par exemple Amour, de Michael Haneke, diffusé cette semaine en clair, ou Drive My Car, de Ryusuke Hamaguchi, choisi pour ouvrir les festivités le mercredi 1er à 22h, mais dispo deux jours plus tôt en ligne.

Vincent Lindon, qui sera à l'affiche du film d'ouverture de la 77e édition, Le Deuxième acte, de Quentin Dupieux, sera par exemple à l'honneur le mercredi 22 mai, avec En guerre, le drame de Stéphane Brizé (2017) suivi d'un documentaire inédit retraçant sa carrière, intitulé Vincent Lindon, le coeur sanglant.

Le mercredi précédent, c'est la Palme d'or 2021, Titane, de Julia Ducournau, dans lequel il tient aussi un rôle important, qui sera visible sur Arte, à 22h45 - après Julie (en 12 chapitres), de Joachim Trier (prix d'interprétation féminine pour Renate Reinsve la même année). Ces deux films seront ensuite en replay gratuitement jusqu'au 16 juin.

Le Genou d'Ahed, de Nadav Lapid, avait reçu le Prix du jury, également en 2021, mais il sera proposé une semaine plus tôt, le 8 mai 2024.

Encore avant, la chaine aura proposé La Loi du silence, d'Alfred Hitchcock, France, de Bruno Dumont et La Fièvre de Petrov, de Kirill Srebrennikov. Enfin, du 20 au 27 mai, Une vie cachée, de Terrence Malick, sera disponible.

Des cycles consacrés à Marco Bellocchio et Michael Haneke seront également proposés, notamment en ligne : Fais de beaux rêves, Les Poings dans les poches, Marx peut attendre et Eterno Notte seront planifiés pour le premier. Caché, Le Ruban blanc, Happy End, La Pianiste, Amour, Code Inconnu, Le Septième continent, Benny's Video, 71 Fragments d'une chronique du hasard, Funny Games et Le Temps du loup sont annoncés, tout comme un documentaire de Marie-Eve de Grave intitulé Code Haneke, pour le second.

Idem pour Stéphane Brizé et Roy Andersson : en plus d'En guerre, le réalisateur français sera à l'honneur avec Je ne suis pas là pour être aimé, Quelques heures de printemps, Mademoiselle Chambon et L'Oeil qui traine. Quant à celui de Nous, les vivants, il sera aussi au coeur d'un cycle avec ce film, ainsi que Chanson du deuxième étage, Une histoire d'amour suédoise, Quelque chose est arrivé et Monde de gloire.

 La chaîne rappelle aussi que le cycle consacré à Sandra Hüller, qui a été acclamée récemment pour Anatomie d'une chute, de Justine Triet et La Zone d'intérêt, de Jonathan Glazer, est toujours d'actualité, avec Amour fou, de Jessica Hausner, Toni Erdmann, de Maren Ade, Requiem, de Hans-Christian Schmid et Une Valse dans les allées, de Thomas Stuber.

18 décembre 2023

Peaky Blinders, ce n'est pas fini ! La bonne nouvelle qui va mettre les fans en joie

Diffusée de 2013 à 2022, Peaky Blinders est l'une des séries marquantes de ces dernières années qui s'est offert une place de choix dans la pop culture. En six saisons, cette fiction britannique de Steven Knight raconte l'histoire des Shelby, une famille de criminels qui tente par tous les moyens de se faire une place dans le paysage industriel puis politique dans le Birmingham et ses environs de l'entre-deux-guerres.

Portée par Cillian Murphy, entre autres, Peaky Blinders est l'une des 10 meilleures séries de tous les temps selon les spectateurs d'AlloCiné avec une note de 4,5 sur 5. Malgré son arrêt après six saisons, sa communauté de fans est toujours très active et en attente de nouveaux projets qui pourraient étendre l'univers.

Le créateur avait annoncé qu'il travaillait sur un film pour conclure la série, en lieu et place d'une septième saison. Mais Steven Knight avait aussi teasé d'autres projets il y a quelques mois et il semblerait que cela se concrétise enfin !

En effet, Bloomberg nous apprend que Netflix est en train de développer deux spin-offs de Peaky Blinders. Selon leurs informations, l'une des séries dérivées se déroulerait à Boston au milieu du XXème siècle, quelques décennies après la série originale.

Reste à savoir si l'ensemble du casting original sera de retour pour reprendre leurs rôles comme Cillian Murphy (Thomas Shelby), Paul Anderson (Arthur Shelby), Sophie Rundle (Ada Thorne), Natasha O'Keeffe (Lizzie Shelby), Finn Cole (Michael Gray), Harry Kirton (Finn Shelby), Aimee-Ffion Edwards (Esme Shelby), Kate Phillips (Linda Shelby) ou encore Anya Taylor-Joy (Gina Gray).

L'autre spin-off serait centré sur Polly Gray, la matriarche du clan Shelby, qui était campée par la regrettée Helen McCrory, décédée en 2021. On peut donc supposer qu'il s'agirait d'un préquel sur la jeunesse de ce personnage adoré par les fans.

Pour le moment, aucune autre information n'a été dévoilée sur ces deux projets de séries dérivées et on ne sait pas si le film annoncé est toujours dans les tuyaux ou si ces deux spin-offs vont remplacer le long-métrage.

15 novembre 2023

Orange mécanique : le roman qui a inspiré le film culte de Stanley Kubrick décrypté dans un documentaire sur Arte

Composé dans une langue inventée, le "nasdat", un anglais argotique hybridé de mots russes, L'orange mécanique, écrit par Anthony Burgess, a provoqué une double onde de choc. La première, à sa parution, en 1962. Puis en 1971, lors de son adaptation au cinéma par Stanley Kubrick.

Accusé de faire l'apologie de la violence, en écho à des actes criminels qui s’étaient revendiqués de son œuvre, l’écrivain britannique, profondément blessé, expose alors dans un manuscrit autobiographique rédigé en 1972-1973, The Clockwork Condition ("La condition mécanique"), son inquiétude sur le monde en train d'advenir.

Il y présente la vision humaniste qui lui a inspiré cet univers dystopique où la violence nihiliste d'une jeunesse sans espoir se fracasse sur un pouvoir décidé à contrôler les êtres par le conditionnement, en usant de technologies toutes-puissantes.

Jamais publié, ce manuscrit ne fut découvert qu'après son décès, en 1993. C'est sur cette trame passionnante que revient l'excellent documentaire diffusé sur Arte ce 15 novembre à 22h20 : Orange mécanique, les rouages de la violence.

Si Burgess accepta de vendre les droits de son roman à Stanley Kubrick et Warner en 1966, le film ne sortira donc qu'en 1971. Frappé de censure dans plusieurs pays (dont certains n'ont levé l'interdiction qu'en 2000 comme en Italie), le film fut exploité pendant deux ans en Grande-Bretagne avant d'être retiré des salles à la demande express de Kubrick (et ne ressortira là-bas qu'à sa mort).

Si Kubrick a façonné une version toute personnelle du personnage principal, Alex, alors que dans le roman il s'agit d'un adolescent de 15 ans, le cinéaste comme l'écrivain ont su capter avec une acuité effrayante et déjà très avant-gardiste la violence qui gangrène notre société.

"L'un des problèmes sociaux les plus déroutants de nos jours est "comment maintenir l'autorité sans être répressif ?" Il y a ce sentiment grandissant parmi les jeunes, que la politique et les moyens légaux pour faire évoluer la société sont trop lents et sûrement inutiles. D'un autre côté, l'autorité se sent menacée par le terrorisme et ce sentiment croissant d'anarchisme" expliquait alors Kubrick.

Ajoutant : la question est : "comment trouver, si c'est encore possible, un équilibre ?" La réponse n'est pas dans la vision optimiste très utopique visant à détruire l'autorité pour en tirer du bien. Et ce n'est pas non plus en disant que l'autorité doit s'imposer par la force. C'est un dilemme".

Burgess acceptera de s'associer à la promotion du film, mais sera blessé par les attaques incessantes sur son oeuvre -désormais portée à l'écran. "Depuis la sortie du film, on m'associe à sa violence. Si on violait des nonnes, les journalistes m'appelaient pour savoir ce que j'en pensais et si je ne me sentais pas responsable. On m'a étiqueté expert dans la violence, ce que je ne suis pas" commentait l'auteur dans une interview télévisée dont un extrait est diffusé dans le documentaire.

"Nous devenons indifférents lorsque les médias nous abreuvent, jour après jour, de reportages et d'images d'une réalité violente" expliquait Burgess, qui décrit aussi dans son roman, à travers le fameux traitement Ludovico que subit Alex, les techniques coercitives menées par les gouvernements pour "guérir" toutes sortes d'habitudes anti-sociales : l'alcoolisme, la toxicomanie, ou encore l'homosexualité. Ce sont les fameuses et infâmantes thérapies de conversion.

In fine, la question du libre arbitre est centrale chez Burgess et dans son oeuvre. "L'idée que notre capacité puisse être limitée par une force extérieure me terrifie" écrivait-il dans The Clockwork Condition. "Je crains que l'Etat ne soit prêt à s'emparer de nos cerveaux et à faire de nous de bons petits citoyens privés de libre arbitre. Autrement dit, des oranges mécaniques". Plus de 50 ans plus tard, cette interrogation reste, à l'ère de surveillance des masses, plus que jamais d'une brûlante actualité.

"Orange mécanique, les rouages de la violence", diffusé ce mercredi 15 novembre sur Arte à 22h20. Egalement disponible sur arte.tv jusqu'au 12 mai 2024.

13 novembre 2023

Michael Douglas est à l'honneur sur Arte

Un Américain, que rien ne distingue d'un autre, patiente interminablement dans l'habitacle de sa voiture individuelle, immatriculée «D-Fens», coincée dans un énorme embouteillage à Los Angeles. Il fait une chaleur torride. Une mouche bourdonne. L'homme comprend qu'il accumule un retard tel qu'il n'arrivera pas à temps pour l'anniversaire de sa fille. Pris de fureur, il quitte sa voiture et tente de faire le chemin à pied. Il ne tolère aucun obstacle. Il dévaste une épicerie, se bat avec des voyous, met la main sur un arsenal, mitraille à tous vents et ne laisse pas une cloison debout d'un fast-food. L'inspecteur Prendergast le prend en chasse. Une illustration au montage parfaitement maitrisé des contradictions et des violences tapies au coeur de notre civilisation.

"Que dire de Chute libre et son début parfaitement oppressant avec Michael Douglas en mode cocotte-minute coincé dans sa voiture ?, écrivait-on au moment de la disparition de son réalisateur, Joel Schumacher, en juin 2020. Le personnage, à l’image du propos, est border-line. On peut voir la chose comme un pendant wasp du Do the Right Thing de Spike Lee, sorti quatre ans plus tôt, soit le récit d’un pétage de plombs sous une chaleur insupportable. Racisme, rancœur, sueur, et une société américaine qui part à la dérive. C’est assurément le film qui restera au-dessus de la pile."

Trente ans après sa sortie, Chute Libre est à l'honneur sur Arte, dans le cadre d'une soirée spéciale Michael Douglas. Après la rediffusion de ce thriller également porté par Barbara Hershey et Robert Duvall, la chaîne proposera un documentaire inédit, et déjà visible en replay, intitulé Michael Douglas, l'enfant prodige.

Un portrait signé par Amine Mestari (Claude Sautet, le calme et la dissonance, diffué sur la même chaîne) au cours duquel le comédien et producteur américain se confie face caméra sur sa carrière. Il parle d'abord de son enfance, de ses débuts d'acteur dans l'ombre de son père Kirk, puis de son émancipation par la télévision via la série à succès Les Rues de San Francisco, et la production de Vol au-dessus d'un nid de coucou, qui a connu un succès phénoménal en 1976. Son propre triomphe en tant que comédien viendra deux décennies plus tard, grâce à Wall Street qui lui vaudra l'Oscar, et entre deux films remarqués, Michael Douglas évoque aussi sa vie personnelle, les déboires de son fils accro aux drogues ou son cancer de la gorge, dont il a parlé publiquement quand l'équipe de Steven Soderbergh l'a attendu pour pouvoir tourner ensemble Ma vie avec Liberace, il y a dix ans. Un documentaire touchant pour un artiste complet.

31 octobre 2023

Robert Downey Jr. est Charlie Chaplin, à voir sur Arte

Au crépuscule de sa vie, Charles Chaplin se raconte à George Hayden, son biographe. Le “kid” qui, à 5 ans, a dû remplacer sur scène sa mère chanteuse de music-hall après qu’elle a été huée dans un cabaret londonien voit déjà son destin tout tracé : le spectacle sera son gagne-pain.

Au début des années 1910, repéré par l’impresario Fred Karno, l’artiste quitte les brumes de son Angleterre natale pour entamer une grande tournée aux États-Unis. Trois ans plus tard, un studio californien l’engage pour jouer ses gags au cinéma, sous la houlette de Mack Sennett. Un nouveau monde s’ouvre à lui…

Des années 80 jusqu’au début des années 90, Robert Downey Jr. est l’un des acteurs les plus prometteurs de sa génération. C’est à cette époque encore lumineuse qu’il accepte le rôle de Chaplin, un biopic réalisé par le vétéran Richard Attenborough. Et c'est peu dire que, vu l'aura entourant ce monstre sacré du 7e Art, l'entreprise s'annonce périlleuse.

Pour le rôle, l’acteur se prépare et s’entraîne comme jamais. Il apprend à jouer au tennis de la main gauche, à jouer du violon, il regarde tous les films de Chaplin et il s'entraîne à mimer la posture et les gestes de l’artiste durant 10 semaines de coaching. Devenu Chaplin, Downey Jr. parvient également à insuffler de lui-même dans le personnage, en livrant une composition formidable et électrisante.

Si son interprétation suscita des critiques favorables, le film fut un très injuste et douloureux échec commercial, avec moins de 10 millions de dollars de recettes au box office international. Ce qui n'a pas empêché le comédien de glaner une citation à l'Oscar du Meilleur acteur. La seule à ce jour d'ailleurs, puisque celle obtenue en 2009 pour le film Tonnerre sous les tropiques fut une citation au titre du Meilleur acteur dans un second rôle.

Ce rôle occupe donc une place bien à part et logiquement chère au coeur de l'acteur, qui a accepté de revenir dessus avec enthousiasme récemment, lors d'un entretien accordé à Vanity Fair alors qu'il assurait la promotion de Oppenheimer.

"Chaplin était un cadeau absolu et un véritable défi pour quelqu’un qui avait 25 ans quand ils ont commencé à préparer le film. Il y avait tous ces gens qui étaient encore là, comme Johnny Hutch qui venait du show The Benny Hill, qui connaissait le gars qui avait vraiment fait ces chorégraphies au théâtre Karno avec Chaplin. [...] Il m'a poussé durant des mois et des mois et des mois".

Johnny Hutch n'était pas n'importe qui. Décédé en 2006, cette légende vivante du monde du cirque fut l'un des plus grands acrobates britanniques du XXe siècle. Il fut d'ailleurs anobli par la reine Elizabeth II en 1994.

""J'ai utilisé tout ce que j'ai pu pour me présenter sur ce rôle" commente Downey Jr; soulignant même qu'avec son travail obsessionnel, il était devenu un expert sur son modèle d'origine. De là cette apostrophe d'Attenborough après le tournage d'une scène où l'acteur avait corrigé certains détails...

"Quand vous avez 25 ans et qu'on vous confie les clés du royaume, vous pouvez perdre vos moyens. Peut-être par peur, peut-être par manque de confiance. Et pour moi – à ce moment-là, sans vouloir me vanter – j’étais autant un expert de Chaplin que toute personne impliquée dans le projet. Et j'apportais des corrections à des choses qui étaient factuellement et historiquement inexactes, ce à quoi Attenborough a dit : "Mais mon garçon, nous faisons un film, pas un documentaire". 

17 octobre 2023

Arte propose sept films pour célébrer les 80 printemps de Catherine Deneuve

Depuis ses débuts au cinéma dans les années 1950, Catherine Deneuve a joui d’une carrière cinématographique singulière. L’actrice à la chevelure emblématique a su se démarquer par des incarnations fantasques qui lui ont permis de sortir des sentiers battus. La sélection proposée par la chaîne franco-allemande illustre bien cet éclectisme, en puisant des rôles à différentes époques de sa filmographie bien remplie.

La chaîne entame son cycle dès la soirée de dimanche 22 octobre avec Potiche (2010) de François Ozon, réalisateur habitué à invoquer Catherine Deneuve dans ses œuvres. Le film en noir et blanc, La vie de château (1966) de Jean-Paul Reppeneau sera diffusé le lendemain. La course se poursuit avec l’émouvant Elle s’en va (2013) d’Emmanuelle Bercot, où une sexagénaire expérimente un road trip revigorant. 

Des films phares de la filmographie de l’actrice comme Peau d’âne (1970) de Jacques Demy, sont accessibles sur la plateforme arte.tv jusqu’au 30 novembre, tout comme Répulsion (1965) de Roman Polanski, disponible jusqu’au 31 janvier 2024. Dancer in the Dark (2000), la comédie musicale originale de Lars Von Trier, diffusée hier soir sur la chaîne, est visible gratuitement en replay jusqu'au 12 avril 2024. Elle fait le lien avec un autre cycle consacré au réalisateur danois.

Au-delà de la fiction, le documentaire Catherine Deneuve, à son image, de Claire Laborey sera diffusé le dimanche 22 à 22h40 et donc disponible en ligne du 15 octobre au 20 novembre. La cinéaste rassemble plusieurs archives remémorant le parcours de celle qui fut premièrement considérée par cette figure blonde flegmatique. Des extraits de films, des images de tournages, des interviews viennent témoigner le talent et la flexibilité de l’actrice la plus française. Dans un projet plus récent de Léa Domenach, Catherine Deneuve joue de son agilité d’interprète en plongeant dans le tailleur imprimé de Bernadette Chirac, première dame de France.

10 octobre 2023

Le suicide, comprendre pour aider : un documentaire d'utilité publique à voir sur Arte

"Le suicide est une problématique qui concerne absolument tout le monde. Pour donner une idée au niveau de l'épidémiologie, la mortalité par suicide est équivalente à celle des accidents de la route. Mais on en parle beaucoup moins, parce que le suicide s'accompagne de beaucoup de préjugés. C'est un sujet difficile à aborder, et encore tabou malheureusement".

C'est en ces termes qu'Emilie Olié, en poste au Département Urgence et Post-Urgence psychiatrique du CHU de Montpellier, pose le cadre d'une réflexion salutaire s'inscrivant au cœur d'un documentaire d'utilité publique. Le suicide, comprendre pour aider, réalisé par James Barrat, est disponible sur arte.tv jusqu'au 8 décembre 2023.

Car c’est l’une des premières causes de mortalité dans le monde. Chaque année, 800.000 personnes mettent fin à leurs jours, et plusieurs millions d'autres survivent à une tentative de suicide.

Ce drame silencieux, qui touche des individus de tous les milieux sociaux, de toutes les générations et de tous les pays, fait aussi des victimes collatérales : les proches, qui s’en trouvent durablement affectés, voire traumatisés. En moyenne, un suicide bouleverserait l’existence d’une vingtaine d’autres personnes.

Un mal-être d'autant plus profond qu'il existe un large éventail de facteurs de risques, à la fois internes et externes, qui peuvent se cumuler : des antécédents de suicide dans la famille, des précédentes tentatives, la toxicomanie, le chômage, les soucis économico-financiers, les problèmes de couples, des ennuis avec la Justice...

"Une proportion non négligeable du risque est d'ordre génétique" explique le Dr John Mann, professeur en neuroscience, psychiatrie et radiologie, de l'Université de Columbia, à New York.

"Mais une part toute aussi importante est de nature environnementale, c'est-à-dire liée à des expériences qui modifient l'expression des gènes. C'est ce que l'on appelle l'épigénétique".

Contrairement à une idée reçue, il est bien souvent possible, en prenant en charge à temps celles et ceux qui présentent des pensées suicidaires, d’empêcher un passage à l’acte.

Au-delà du rôle essentiel des associations qui viennent en aide aux personnes endeuillées par le suicide d'un membre de l'entourage, une des clés de cette aide se trouve dans la prévention à l'échelle d'une société entière, et au niveau national.

Le Danemark, cité en exemple dans le documentaire, l'a bien compris. Alarmé à la fin des années 80 par un fort taux de suicide dans les pays scandinaves, les autorités adoptèrent une série de mesures, comme la prise en charge psychiatrique globale, qui a contribué à faire baisser le taux.

Parallèlement, l'accès aux armes et aux médicaments à risques fut renforcé. Dans ce pays, la prévention va même encore plus loin : dès l'école, les jeunes enfants sont encouragés à exprimer ce qu'ils ressentent, et à ne pas cacher leurs émotions.

En allant à la rencontre de chercheurs, psychiatres, neurologues, mais aussi de proches de victimes ou de personnes ayant voulu attenter à leurs jours, ce poignant documentaire met en lumière les signes qui doivent alerter et les manières de faire face aux risques, chez les autres comme chez soi-même.

Si vous êtes en souffrance ou voulez aider quelqu’un, vous pouvez contacter le 3114, numéro national de prévention du suicide, 24h/24 et 7j/7, ou consulter la page 3114.fr

17 août 2023

Pédoprédateurs piégés sur internet : un documentaire édifiant disponible gratuitement sur Arte

Attention, ce documentaire est difficile et son sujet sensible l'interdit aux moins de 12 ans.

Réalisé en 2020 par Vít Klusák et Barbora Chalupová, le documentaire Pédoprédateurs piégés sur internet s'attaque à la prédation en ligne en "piégeant" les coupables. Ce film a notamment vu le jour suite au constat - rappelé en tête de documentaire - qu'"un enfant sur deux tchatte avec des inconnus sur internet" et qu'"un sur cinq accepterait de rencontrer un inconnu".

Un documentaire à découvrir actuellement et jusqu'au 19 novembre sur Arte.tv.

Afin de révéler les comportements pédoprédateurs ayant cours sur internet, les documentaristes font passer un casting à des jeunes adultes pour en choisir trois ayant des traits juvéniles. Encadrées par des sexologues, des psychologues et l'équipe de tournage qui est en contact direct avec elles parmi les échanges, ces femmes vont se faire passer pour des mineures de 12 ans sur les sites de tchat en direct.

Le résultat est glaçant et le constat implacable : en 10 jours de tournage de midi à minuit, 2458 hommes ont contacté les trois actrices, certains allant jusqu'à leur faire des chantages aux "nudes" (en l'occurence des photos factices des jeunes filles dénudées créées pour le documentaire) ou les rencontrer dans la "vraie vie", sans écran, pour leur proposer d'aller plus loin.

Le documentaire donne également des clés de compréhension et rappelle ce que dit la loi à propos de ces questions.

22 mai 2023

Mort de Ray Stevenson, héros de la série Rome et Volstagg dans la saga Marvel Thor

Le charismatique comédien Ray Stevenson, connu pour ses rôles dans les séries Rome et Dexter ainsi que pour son incarnation de Volstagg dans les films Marvel Thor, est décédé ce lundi 22 mai sur l'île italienne d'Ischia. Une information rapportée par le site Reppublica, qui évoque une "maladie". Le charismatique comédien, qui tournait le film Cassino In Ischia, était âgé de 58 ans.

Ray Stevenson a longtemps mis de côté son amour pour la comédie, croyant ne jamais parvenir à devenir acteur. Ainsi, ce fils de pilote de la Royal Air Force a eu une première carrière professionnelle en tant que décorateur d'intérieur.

Après avoir suivi les cours de la Bristol Old Vic Theatre School, Stevenson fait ses premiers pas d'acteur dans des séries télévisées et téléfilms britanniques à partir de 1993. C'est cette expérience qui lui ouvre les portes du cinéma. Le comédien fait ses premières armes en 2004 dans le film d'action Le Roi Arthur d'Antoine Fuqua aux côtés de Clive Owen. L'acteur y campe le loyal chevalier Dagonet.

L'année suivante est une année cruciale pour le comédien. En effet, Ray Stevenson décroche un rôle marquant qui va l'installer définitivement parmi les acteurs à suivre. Ce rôle, c'est celui de Titus Pullo dans la série à succès Rome. Il y officie deux saisons durant et devient dès lors un comédien reconnu.

Le Britannique enchaîne ensuite les rôles au cinéma. Sa stature (1m93) et son charisme lui permettent d'interpréter des personnages durs et virils comme Frank Castle dans The Punisher - Zone de guerre, Redrige dans Le Livre d'Eli, Porthos dans Les Trois Mousquetaires ou le personnage de Volstagg dans les film de la saga Marvel Thor. Le comédien est également à l'aise dans la comédie : sa prestation loufoque dans Very Bad Cops aux côtés de Mark Wahlberg reste mémorable.

Très en vue, Ray Stevenson obtient le premier rôle d'Irish Gangster en 2011, celui de Danny Green, gangster irlandais de Cleveland. Dans ce biopic, l'acteur donne la réplique au grand Christopher Walken.

Après avoir refait un détour par la case télévision en prêtant sa carrure au mafieux Isaak Sirko dans la septième saison de Dexter, Stevenson est engagé pour jouer les gros bras dans G.I. Joe : Conspiration aux côtés de spécialistes du genre comme Bruce Willis ou Dwayne Johnson. Celui qui s'est illustré dans la saga Divergente frappe à nouveau fort sur petit écran en 2016 avec le rôle de Barbe-Noire dans la série Black Sails.

Ray Stevenson, qui s'était illustré dans la saison 6 de Vikings avec le rôle d'Othere, figure au générique de la série Ahsoka, aventure Star Wars attendue en août prochain sur la plateforme Disney+.

20 mars 2023

Un pont trop loin sur Arte : Sean Connery s'est mis en grève sur ce film, mais pourquoi ?


L'acteur écossais Sean Connery s'est mis en grève avant le début du tournage du film de guerre Un pont trop loin, en raison de disparités salariales. Il s'estimait sous-payé comparé à d'autres stars du film.

S'inscrivant dans la mode des films de guerre "fresques" à la façon du Jour le plus long, des Canons de Navarone ou du Pont de la rivière Kwai, Un pont trop loin possède un budget pharaonique, des figurants par centaines, le film est un blockbuster de l'époque. Réalisé par Richard Attenborough, il possède un casting de stars impressionnants.

On voit ainsi se succéder à l'écran Dirk Bogarde, James Caan, Michael Caine, Sean Connery, Edward Fox, Elliott Gould, Gene Hackman, Anthony Hopkins, Hardy Krüger, Laurence Olivier, Ryan O'Neal, Robert Redford, Maximilian Schell et Liv Ullmann.

La première de ces stars a avoir signé pour le film était Sean Connery dans le rôle du général Robert Urquhart, pour la somme de 250 000 dollars, soit 1,2 million d'aujourd'hui. Mais à trois semaines du tournage, il découvre dans les journaux des disparités de salaire :

"Au début, j'ai cru à une erreur, mais j'ai appris que ça n'en était pas une. Au prorata de la taille de mon rôle dans le film, le salaire sur lequel nous étions tombés d'accord semblait juste. Mais quand j'ai découvert combien d'autres obtenaient - pour la même quantité de travail et à jeu égal - c'est devenu injuste."

Parmi ces "autres" mieux payés, on trouve Robert Redford, qui a moins de présence que Connery dans le film, et touche bien plus (la rumeur parle de 2 millions de dollars, près de 10 millions d'aujourd'hui).

Il faut dire que Redford est alors au fait de sa gloire (il vient de tourner L'Arnaque, Gatsby, Les 3 jours du Condor et sort des Hommes du président), là où les derniers films de Connery n'ont pas vraiment été de gros succès depuis qu'il a raccroché le rôle de Bond en 1971 après Les Diamants sont éternels.

La volonté de Connery de toucher plus n'est pas un caprise, si l'on en croit le comédien Ian Bannen, qui avait tourné avec lui La Colline des hommes perdus :

"Ce n'était pas de la cupidité ou de l'arrogance égocentrique. Je connais Sean, l'un de ses slogans après Bond était : 'payez-moi ce que je vaux'. Bien entendu, il a tiqué que puique Redford était payé si haut, il méritait plus."

Avant même de tourner la moindre image du film, Sean Connery a donc exprimé son mécontentement auprès du producteur Joseph E. Levine. Se mettant en grève et refusant de se rendre au travail sans revalorisation de son salaire, le comédien a finalement obtenu ce qu'il souhaitait.

Levine lui a accordé une augmentation de 50%, et le tournage a pu commencer dans les temps à Deventer (Pays-Bas).

A peine 4 ans plus tard, Sean Connery reviendra sur le devant de la scène au début des années 80 avec successivement Meurtres en direct, Highlander, Le Nom de la rose et Les Incorruptibles, relançant sa carrière auprès du grand public.

27 février 2023

Arte : le réalisateur Richard Fleischer a été forcé à tourner Bandido Caballero !

Bandido Caballero ! est la première production de Robert Mitchum, et sa seconde collaboration avec le réalisateur Richard Fleischer, qui avait entièrement "reshooté" (retourné après son tournage principal) le film Fini de rire.

A ses premiers stades de développement, Bandido Caballero ! s'appelle encore Horse Opera. Fleischer est enthousiasmé par l'histoire, celle d'un soldat de fortune mexicain libérant une équipe de tournage des mains de Pancho Villa et s'enfuyant avec eux pour Hollywood tout en tombant amoureuse de la jeune première de la troupe et devenant par accident une star de cinéma.

Lorsqu'il signe pour faire le projet, il se réjouit d'avance, comme il le confie dans ses mémoires, Just tell me when to cry :

"Toutes les conditions étaient réunies : Jacks [le producteur] était un chic type, Mitchum était hilarant, l'histoire était une aventure légère et satirique et le tout allait être tourné dans un Mexique romantique et pittoresque."

Cette bonne histoire doit être transformée en scénario par Earl Felton, et il a le temps d'écrire puisque Fleischer part filmer La Fille sur la balançoire. A son retour cependant, Felton a seulement écrit "un peu moins de la moitié" de Horse Opera et il a finalement décidé de partir sur un film d'aventure / western très classique en occultant Pancho Villa et tout lien avec Hollywood.

Dès lors, le projet est mal parti, ne ressemble plus à ce qu'il avait accepté à l'origine, et Fleischer essaye de s'en défaire. Il prévient Jacks, son producteur, qui avertit le studio, United Artists. Le cinéaste se souvient que tout s'est alors compliqué pour lui :

"Lorsqu'une star est impliquée [ici Robert Mitchum, NdlR] et que le réalisateur s'en va car il déteste le scénario, tout le monde devient hystérique. Ils ont peur que la star soit susceptible d'être effrayée et qu'elle lâche elle aussi le projet."

"(...) Mais j'avais [signé] un contrat et ils me tenaient. 'Quitte-nous et c'est le procès, mon gars'. J'aurais pu partir et peut-être gagner le procès. Mais si j'avais perdu ? A ce stade de ma carrière, je n'avais vraiment pas besoin d'un procès. Je suis donc resté, et j'ai demandé à ce que le scénario soit réécrit."

Sauf que Mitchum, lui, a d'autres engagements et il faut que le tournage commence dans six semaines. C'est la panique : "Il n'y avait pas assez de temps pour reprendre l'idée originale et écrire un scénario de zéro", se souvient Fleischer. "Nous avons dû repartir du script existant en tentant de lui donner sens."

Finalement, Horse Opera devient Bandido Caballero! et raconte comment Wilson, un trafiquant d'armes, propose de faire affaires avec l'armée régulière mexicaine en lutte contre les rebelles. Pour leur trouver des armes, Wilson envisage de voler sa cargaison d'armes à un certain Kennedy.

Fleischer fait contre mauvaise fortune bon coeur en prenant beaucoup de plaisir à tourner au Mexique et livre un film fort agréable, qui sera un joli succès lors de sa sortie en 1956.

19 décembre 2022

Arte : Vivien Leigh, le drame qui a brisé sa carrière au coeur d'un documentaire gratuit

Arte consacre un documentaire à une actrice majeure de l'époque classique hollywoodienne, disponible gratuitement jusqu'au 16 février 2023.

On oublie parfois un peu vite les deux Oscars de Vivien Leigh. D'abord pour Autant en emporte le vent pour le rôle mythique de Scarlett O'Hara, puis Un tramway nommé Désir dans celui de Blanche DuBois. Et si une tragédie personnelle ne s'en était pas mêlée, elle aurait sans doute encore pu enchainer les récompenses.

Le drame survient en 1945. Vivien Leigh est mariée avec l'acteur Laurence Olivier. Elle vient de tourner avec lui dans Lady Hamilton et d'achever une tournée en soutien aux troupes britanniques. Elle retourne alors à Hollywood pour le tournage de César et Cléopâtre de Gabriel Pascal, adapté de George Bernard Shaw.

Alors qu'elle est sur le plateau, elle glisse du haut des escaliers et se blesse. Malheureusement, elle était enceinte et perd son enfant. Une épreuve dont elle ne se remettra jamais vraiment. Elle est alors victime d'une crise maniaco-dépressive qui rendra la fin de la production très compliquée.

Cette crise que l'on pense alors temporaire se muera en dépression durable, mettant à plusieurs reprises un frein à sa carrière et à sa vie personnelle. Pour connaître tous les détails de la fabuleuse carrière de l'actrice, découvrez Vivien Leigh, autant en emporte le vent, un documentaire gratuitement mis en ligne par Arte.

10 octobre 2022

Annie Ernaux sur Arte : dans l'intimité du prix Nobel de littérature avec un documentaire gratuit

Dans l'intimité d'un prix Nobel de littérature... La Française Annie Ernaux, qui s'est vue récemment décerner la prestigieuse récompense, est à l'honneur sur Arte. Le documentaire Les Années Super 8, qu'elle a réalisé avec son fils David, est en effet disponible gratuitement, jusqu'au 31 octobre, sur Arte.tv.

Présentée à la Quinzaine des Réalisateurs lors du dernier Festival de Cannes, cette oeuvre, qui nous plonge dans l'intimité de la femme de lettres avant sa carrière d'écrivaine, sortira en salles le 14 décembre prochain.

Dans le documentaire Les Années Super 8, Annie Ernaux pose sa voix sur des bribes d’images muettes provenant de films de famille des années 70. Elle propose ainsi la chronique d’une époque tout autant qu’un puissant récit d’émancipation féminine.

"En revoyant nos films super huit pris entre 1972 et 1981, il m’est apparu que ceux-ci constituaient non seulement une archive familiale mais aussi un témoignage sur les goûts, les loisirs, le style de vie et les aspirations d’une classe sociale, au cours de la décennie qui suit 1968", déclare Annie Ernaux, dont les romans Passion Simple et L'Evénement ont notamment été portés à l'écran. "Ces images muettes, j’ai eu envie de les intégrer dans un récit au croisement de l’histoire, du social et aussi de l’intime, en utilisant mon journal personnel de ces années-là." 

23 septembre 2022

En Thérapie : pas de saison 3 pour la série à succès d'Arte

En février 2021, Arte lançait la diffusion de la saison 1 de En Thérapie, l'adaptation française de la série israélienne Betipul.

Réalisée par le duo Eric Toledano et Olivier Nakache, cette fiction réunissant un casting 5 étoiles a très vite rencontré un vif succès à la fois à l'antenne, mais également sur la plateforme Arte.tv, avec un cumul de 41 millions de vues pour les 35 épisodes de la saison 1. Un record d’audience historique pour la chaîne franco-allemande.

"Cela a été un tournant dans la perception que le public avait d'Arte", a confié le directeur de la chaîne, Bruno Patino, dans une interview accordée au nos confrères de Puremedias. Face à cet engouement, une saison 2 a vu le jour avec de nouveaux acteurs, comme Jacques Weber, Charlotte Gainsbourg, ou encore Suzanne Lindon.

Pour l’occasion, le fil rouge de la première salve d’épisodes, qui tournait autour des attentats du 13 novembre 2015, avait laissé place à une intrigue sur le premier confinement. Si les audiences ont été en recul, le succès était tout de même au rendez-vous pour cette saison 2 de En Thérapie.

Bien qu’au moment de la diffusion de la saison 2, une saison 3 était possible, Olivier Wotling, le directeur de la fiction d’Arte, a confirmé au Film Français que En Thérapie ne reviendrait pas à l’antenne.

“Cette décision a été prise en accord avec les créateurs. Olivier Nakache et Eric Toledano avaient envie de repartir au cinéma”, a-t-il ainsi expliqué. “De plus, l’original israélien, Betipul, n’a pas eu de troisième saison. Nous aurions pu repartir sur une autre déclinaison mondiale de la série mais cela n’a pas été notre souhait”.

Une information confirmée par Bruno Patino à nos confrères de Puremedias. “Nous ne faisons pas de saison pour faire des saisons. Le premier motif pour le faire, ce n'est pas l'analyse d'audience, c'est de se demander si on va être capable de faire une saison aussi forte. La répétition ne m'intéresse pas. La saison 3 dépend de cela aussi. Pour le moment, elle n'est pas en chantier".

Olivier Nakache et Eric Toledano travaillent actuellement sur leur prochain long-métrage, Une année difficile, avec Pio Marmaï, Alban Ivanov, Noémie Merlant et Mathieu Amalric. Sortie en salles prévue pour le 18 octobre 2023.

17 août 2022

Breaking Bad : une polémique éclate au Nouveau-Mexique

Depuis le mois dernier, Walter White et Jesse Pinkman, les héros de Breaking Bad, ont des statues à leur effigie à Albuquerque, ville de l'Etat du Nouveau-Mexique où se déroule l'action de la série culte. Une cérémonie d'inauguration avait même eu lieu en présence des acteurs Bryan Cranston et Aaron Paul, de Vince Gilligan, le créateur du show, et de Tim Keller, le maire d'Albuquerque.

Durant cette inauguration, Vince Gilligan avait déclaré voir dans ces statues "deux des meilleurs acteurs que l'Amérique ait jamais produits. Deux acteurs, dans leurs personnages, comme deux figures tragiques dans des récits édifiants." Mais il avait également pressenti qu'honorer ces personnages fictifs ne serait pas unanimement salué au Nouveau-Mexique. Et il avait raison.

La présence de ces statues à Albuquerque irrite en effet fortement Rod Montoya, représentant républicain du Nouveau-Mexique. "Je suis ravi que ça fasse tourner le business de l'Etat, mais vraiment ? On va littéralement glorifier les fabricants de méthamphétamine ?", s'emporte l'homme politique au micro de Fox News.

"Ce n'est pas le genre de reconnaissance que nous voulons pour la ville d'Albuquerque ou pour notre Etat", déclare quant à lui l'animateur radio Eddy Aragon dans des propos rapportés par Variety. "Honnêtement, ce que vous avez vu dans Breaking Bad devrait être vu comme un documentaire. Je pense vraiment que c'est la réalité au Nouveau-Mexique. On essaie de dire que c'est de la fiction, mais c'est la réalité..."

Aragon regrette l'arrivée de ces statues alors que celle du conquistador Juan de Oñate, premier gouverneur espagnol du Nouveau-Mexique, a été démontée. "Nous avons maintenant de toutes nouvelles statues, des personnages fictifs que nous mettons en avant, chose que notre maire progressiste a soutenu. Nous finançons ça, le fait de nous débarrasser de vrais personnages historiques pour, maintenant, c'est encore mieux, avoir des personnages fictifs qui sont des trafiquants de drogue", lâche-t-il avec ironie.

Pour Tim Keller, le maire d'Albuquerque, il était approprié d'ériger ces statues au regard de l'impact économique de Breaking Bad sur la ville. "Bien que les histoires puissent être fictives, les emplois sont réels chaque jour", déclare-t-il. "La ville est également un personnage... Nous nous voyons dans la série de tant de manières, bonnes et mauvaises."

11 juillet 2022

Patrick Swayze : un émouvant documentaire à découvrir sur Arte

Dirty Dancing, Ghost, Point Break... En quelques films, Patrick Swayze a laissé une empreinte indélébile dans le paysage cinématographique et l'imaginaire collectif. On ne peut donc que vous conseiller de découvrir Acteur et danseur par passion, très bon documentaire consacré à la regrettée star américaine, diffusé ce dimanche soir sur Arte et disponible ensuite jusqu'au 8 août sur la plateforme Arte.tv.

S'il est de facture très classique et dénué de grandes révélations, ce documentaire est pour autant une franche réussite. Suivant le parcours de Patrick Swayze de son Texas natal aux succès à l'écran, le film évoque notamment la passion de l'Américain pour la danse classique. Tout au long de cette heure et demie qui passe très vite, on découvre un homme aussi volontaire que fragile, aussi solide que vulnérable, et au final terriblement attachant. 

Riche en archives, le documentaire Patrick Swayze, acteur et danseur par passion l'est également en témoignages, avec des interventions de sa femme Lisa, de son frère, de son agent et de stars hollywoodiennes l'ayant côtoyé comme Demi Moore ou encore Jennifer Grey, son inoubliable partenaire de Dirty Dancing. La grande qualité du film ? Il n'omet pas les moments sombres du parcours de l'acteur, victime de troubles bipolaires et engagé dans un combat contre l'alcoolisme.

Très touchant, ce portrait du regretté Patrick Swayze, emporté par la maladie en 2009 à seulement 57 ans, est donc à vite découvrir sur Arte. Que vous soyez fans ou pas de l'acteur américain, vous en ressortirez sans doute les yeux embués, après 90 minutes passées en compagnie d'une des stars les plus attachantes du septième art. 

10 juin 2022

Peaky Blinders saison 6 : l'hommage émouvant à Helen McCrory

Attention, spoilers. Les paragraphes suivants révèlent des éléments d'intrigue de la saison 6 de Peaky Blinders.

La sixième et dernière saison de Peaky Blinders vient d'arriver sur Netflix et les fans auront le plaisir de retrouver la famille Shelby. Malheureusement, un membre manque à l'appel pour cette ultime chapitre de la série britannique : Helen McCrory, l'interprète de la tante Polly, qui est décédée en avril 2021 des suites d'un cancer.

Si l'équipe de Peaky Blinders a rendu un hommage élégant à l'actrice lors du tournage avec un clap customisé avec un dessin d'Helen McCrory dessus, elle l'a également mis à l'honneur dans le premier épisode de la saison 6, qui lui est d'ailleurs dédié.

Il a fallu pour le créateur Steven Knight remanier le scénario de l'ultime salve d'épisodes de Peaky Blinders pour intégrer la disparition de l'actrice, qui n'avait pu tourner aucune scène à l'époque du tournage. Ainsi, Tante Polly est devenue l'une des victimes collatérales de la tentative d'assassinat du politicien fasciste Oswald Mosley.

C'est le capitaine Swing, qui a déjoué la tentative d'assassinat qui prévient Tommy Shelby (Cillian Murphy) et qui lui rend les corps de Polly, Aberama et Barney. Plus tard, toute la famille Shelby est réunie pour les funérailles de Polly, selon les traditions de la communauté tzigane.

Cet évènement va mettre son fils Michael dans un tel état de rage qu'il va vouloir se venger de Tommy, qu'il croit responsable, et le tuer. La mort de Polly va affecter tous les membres de la famille, qui vont chacun sombrer à leur manière et vont devoir affronter leurs démons et différentes problématiques.

Aborder l'absence d'Helen McCrory a été un sujet important pour le showrunner Steven Knight. Ce dernier a ainsi expliqué à Radio Times que la "perte d'un être humain, la perte d'Helen a été la vraie tragédie. La perte du personnage est infinitésimale à côté de la perte de l'être humain. Et pourtant, nous avons dû gérer ça."

Steven Knight avait bon espoir de voir Tante Polly dans la saison 6, dont le tournage avait commencé en janvier 2021, mais il a dû se faire une raison au fur et à mesure : "Au début, Polly était dans la saison, puis petit à petit, il est devenu évident qu'elle serait de moins en moins capable de faire. Et donc à la fin, nous avions atteint un point où nous savions qu'elle ne pouvait pas être dedans du tout.

Et puis il faut d'abord faire face aux conséquences en termes d'histoire, en prenant un moment pour faire face à la perte du personnage, mais en sachant ensuite que cela a un reflet dans le monde réel avec la perte de la personne. Donc, il fallait essayer d'équilibrer tout cela, et je pense que nous l'avons bien fait."

Bien que Polly ne soit pas physiquement là, le showrunner a su faire planer son esprit tout au long de la saison, grâce à sa voix notamment, comme l'explique Cillian Murphy à Radio Times :

"C'est une énorme perte, c'est difficile à comprendre. Parce qu'elle était la matriarche. En tant que personnage, mais aussi en tant que personne. Mais elle est toujours présente dans la saison 6. Steven a réussi à la garder très, très présente, ce qui, je pense, est un brillant hommage à Helen."

10 mai 2022

Arte : Le monde selon Xi Jinping

"Observons avec calme, garantissons nos positions, gérons les affaires avec sang-froid, cachons nos capacités et attendons notre heure, sachons garder un profil bas, ne prétendons jamais au leadership, toujours cherchons des réalisations". Telle était la stratégie dite "des 24 caractères" formulée par le dirigeant chinois Deng Xiaoping en 1991.

Une profession de foi qui fut l'Etoile du Nord de la Chine durant ces 30 dernières années, faisant prendre au pays un essor économique absolument phénoménal, assumant désormais sans complexe une expansion internationale qui en fait une puissance économique, politique et militaire redoutée. Entre les mains du tout puissant Parti Communiste Chinois, l'Empire du Milieu ne se contente plus d'être, comme il le fut durant si longtemps, l'atelier du monde.

Il aspire désormais à lui les sociétés à fort potentiels technologiques, les matières premières, une quantité colossale de ressources énergétiques, et même les terres agricoles. Devenue la seconde puissance économique mondiale, la Chine a désormais un unique but. Que ce pays de 1,4 milliards d'habitants devienne la première puissance mondiale d'ici 2049; date anniversaire du centenaire de la fondation de la République populaire de Chine.

C'est en tout cas le rêve caressé par Xi Jinping, au coeur d'un passionnant et glaçant portrait diffusé ce soir sur Arte, Le monde selon Xi Jinping. Derrière son apparente bonhommie se cache un chef redoutable. En mars 2018, à l’issue de vastes purges, Xi Jinping modifie la Constitution et s’intronise "président à vie". Une concentration des pouvoirs jamais vue depuis la fin de l'ère maoïste.

Né en 1953, ce fils d’un proche de Mao Zedong révoqué pour "complot antiparti" choisit à l'adolescence, en pleine tourmente de la Révolution culturelle, un exil volontaire à la campagne pendant sept ans, comme pour racheter la déchéance paternelle. Revendiquant une fidélité aveugle au Parti, il gravira en apparatchik "plus rouge que rouge" tous les degrés du pouvoir. Et même si son père fut réhabilité, il aura la sagesse, sinon l'intelligence, de (re)partir tout en bas de l'échelle, en province; faire profil bas et ne pas se comporter en prince rouge. De quoi satisfaire les caciques du régime, qui apprécient cette modestie et peuvent surtout contrôler les jeunes pousses en devenir du PCC.

Depuis son accession au secrétariat général du Parti en 2012, puis à la présidence l'année suivante, les autocritiques d'opposants ont réapparu, par le biais de confessions télévisées. Il lancera même une campagne anti-corruption, baptisée "chasse aux tigres et aux moucherons"; le même nom qu'une ancienne campagne de purges à l'époque de Mao... Un moyen pratique surtout pour faire condamner tous ses opposants politiques. Bilan ? 170 ministres et vice-ministres, 4000 officiers de l'armée et une centaine de généraux, partis croupire en prison ou assignés à résidence. Au total, 1,5 millions de cadres du Parti ont été purgés.

Quelques mois après son investiture, ses opposants avaient fait fuiter dans la Presse un document confidentiel, dans lequel Xi Jinping avait synthétisé sa pensée. Baptisé "document n°9", on y découvrait dedans un Xi Jinping préoccupé par les forces étrangères jugées hostiles, énumérant les 7 idées occidentales jugées potentiellement mortelles pour la Chine, parmi lesquelles la démocratie, les valeurs universelles comme les Droits de l'Homme, ou encore la liberté de la Presse.

"Ce dont on ne s'aperçoit pas forcément à l'étranger, c'est que quotidiennement, la propagande chinoise nous dénonce, dénonce nos valeurs. Nous sommes donc dans une guerre idéologique frontale et totale avec la Chine populaire" commente le politologue Jean-Pierre Cabestan dans le documentaire, travaillant au sein de l'université Baptiste de Hong Kong.

Depuis son accession au pouvoir, "il espère réaliser une grande synthèse entre l'héritage de la Chine impériale et la Chine communiste" explique François Bougon, ancien correspondant à Pékin pour l'AFP, et journaliste au Monde. En d'autres termes, "rebâtir une légitimité au Parti Communiste Chinois (PCC). Et où trouve-t-il cette nouvelle légitimité ? Dans le nationalisme et tout ce qui fait la grandeur du pays".

Pour bâtir ce nouveau roman national et cimenter la nation autour de lui, Xi Jinping convoque les douloureux exemples du passé. Les défaites vécues par la Chine dans les deux guerres de l'Opium au XIXe siècle, qui se soldèrent par des traités humiliants et inégaux imposés par les Occidentaux, comme la perte des territoires de Hong Kong et Macao.

Dans ce rêve chinois caressé par le nouvel empereur rouge, il ne peut y avoir qu'une seule identité, aucune différence. C'est dans cette logique bien comprise et ultra répressive qu'un système de surveillance généralisée censé faire le tri entre les bons et les mauvais citoyens est mis en place, quand il ne s'agit pas de mater toute contestation, comme à Hong Kong. John Lee, l'ancien chef de la sécurité, qui a joué un rôle clé dans la brutale répression du mouvement pro-démocratie, vient d'ailleurs tout juste d'être nommé par Pékin pour diriger le territoire.

Elle passe aussi par une assimilation forcée des populations Ouïghours, victimes depuis 2016 d'une politique génocidaire menée au Xinjiang, une région de l'Ouest de la Chine. Des centaines de milliers de citoyens ouïghours ont été internés dans des camps ou condamnés à des années de prison. Travail forcé, séparation des familles, stérilisation forcée, destruction des cimetières et des lieux de culte... "Soyez sans pitié" avait dit, en 2014, le président Xi Jinping...

Inflexible et impitoyable sur le plan intérieur, il s'est donné comme objectif de supplanter l'Occident à la tête d’un nouvel ordre mondial. Son projet des "routes de la soie" a ainsi considérablement étendu le réseau des infrastructures chinoises à l’échelle planétaire. Cet expansionnisme stratégique, jusque-là développé en silence, inquiète de plus en plus l'Europe et les États-Unis.

C'est que la Chine a les moyens de ses ambitions : Xi Jinping a sorti 1000 milliards de dollars pour bâtir ce projet à l'échelle du globe, sans équivalent. Dans ces nouvelles considérations, l'Afrique occupe d'ailleurs une place de choix : depuis 2013, la Chine a prêté plus de 120 milliards $ aux Etats du continent, faisant du pays le premier partenaire commercial de l'Afrique.

Une hégémonie chinoise bâtie (entre-autre) sur un nationalisme exacerbé qui s'accompagne logiquement de vives tensions diplomatiques, dont l'abcès de fixation pour les années à venir est déjà tout trouvé : le sort de la province rebelle de Taiwan.

"La réunification est une affaire historique, c'est la voie à suivre, tandis que l'indépendance de Taiwan est une impasse. Nous n'excluons pas le recours à la force, et nous nous réservons le droit d'utiliser tous les moyens nécessaires" avait asséné Xi Jinping en 2021. L'invasion de l'Ukraine par la Russie a d'ailleurs brutalement ravivé la crainte d'une invasion de l'île par la Chine continentale, au point que l'armée taïwanaise a publié en avril dernier un manuel de survie destiné aux civils...

"Quand la Chine s'éveillera, le monde tremblera" avait prophétisé l'écrivain et homme politique Alain Peyrefitte, dans son célèbre ouvrage publié en 1973. 49 ans plus tard, le pays s'est bien réveillé. Devenu un géant économique, il effraie autant qu'il fascine, par son mélange d'autoritarisme absolu et de modernité. "Le "rêve" de Xi Jinping profite d'abord du cauchemar des démocraties libérales, affaiblies par la montée des inégalités, la remise en cause des élites et le populisme" conclue François Bougon. Des propos guère rassurants...

Le monde selon Xi Jinping, documentaire de Sophie Lepault et Romain Franklin, diffusé ce soir sur Arte à 20h55. Egalement disponible sur Arte TV depuis le 3 mai jusqu'au 30 mai 2022.

05 avril 2022

Sauvages, au coeur des zoos humains sur Arte : l'horreur des zoos humains racontée dans un documentaire choc

Ils se nomment Petite Capeline, Tambo, Moliko, Ota Benga, Marius Kaloïe et Jean Thiam. Fuégienne de Patagonie, Aborigène d’Australie, Kali’na de Guyane, Pygmée du Congo, Kanak de Nouvelle-Calédonie, ces six-là, comme 35.000 autres entre 1810 et 1940, ont été arrachés à leur terre lointaine pour répondre à la curiosité d'un public en mal d'exotisme, dans les grandes métropoles occidentales.

Présentés comme des monstres de foire, voire comme des cannibales, exhibés dans de véritables zoos humains, ils ont été source de distraction pour plus d'un milliard et demi d'Européens et d'Américains, venus les découvrir en famille au cirque ou dans des villages indigènes reconstitués, lors des grandes expositions universelles et coloniales...

"La barbarie, c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie" écrivait l'immense anthropologue et ethnologue français Claude Levi-Strauss dans son célèbre ouvrage Race et Histoire, publié en 1952. Cette citation, placée au tout début du documentaire Sauvages, au coeur des zoos humains, constitue le point d'ancrage et le fil conducteur du film réalisé par Pascal Blanchard et Bruno Victor-Pujebet.

Il importe de replacer cette citation dans son contexte. Le point de départ de la réflexion de Lévi-Strauss était la réfutation radicale de la thèse développée par Arthur de Gobineau, célèbre pour son livre L'Essai sur l'inégalité des races humaines, qui aura un impact considérable sur les théories racialistes au XIXe et XXe siècle.

Dans cet ouvrage paru en 1853, il postulait l'existence de trois races primitives (blanche, jaune et noir), dont les métissages conduisaient à la décadence de l'espèce humaine. Dans cet essai, la race blanche se voyait octroyé "le monopole de la beauté, de l'intelligence et de la force".

Pour Claude Lévi-Strauss, la diversité des cultures ne fût jamais assimilée comme un phénomène naturel, mais davantage comme une monstruosité. Il soulignait l’évolution qui s’est produite lorsque la civilisation occidentale a substitué le terme "barbare" par "sauvage"; les autre formes culturelles différentes étant dans cette logique viscéralement rejetées et systématiquement placées en situation d'infériorité.

"Les Zoos humains, c'est le passage d'un racisme scientifique à un racisme populaire" explique l'historien Pascal Blanchard, spécialiste de l'empire colonial français et de l'Histoire de l'immigration, et co-auteur du documentaire.

On se souvient ainsi avec horreur de cette séquence d'ouverture terrible du film Vénus noire d'Abdellatif Kechiche, qui évoquait l'histoire authentique et tragique de Saartjie Baartman, femme khoïsan originaire d'Afrique du Sud, exhibée en Europe au début du XIXe siècle pour son large postérieur, où elle était connue sous le surnom de «Vénus hottentote».

Dans un amphithéâtre, le fameux naturaliste français, Georges Cuvier, montrait les organes génitaux d'une femme qu'il venait d'extraire, avant de lâcher un peu plus loin : "Je n'ai jamais vu de tête humaine plus semblable à celle des singes". Un parterre de distingués collègues applaudissaient la démonstration. C'était en 1817.

Son histoire, souvent prise pour exemple, est révélatrice de la manière dont les Européens considéraient à l'époque ceux qu'ils désignaient comme appartenant à des "races inférieures". Le squelette et moulage du corps de la malheureuse seront ainsi exposés jusqu'en 1976 au Musée de l'Homme à Paris, et il faudra attendre 2002 pour que sa dépouille ne soit restituée à l'Afrique du Sud, la terre de ses ancêtres.

Le phénomène des zoos humains naît vraiment dans les années 1870-1880. "Ces êtres humains fascinent, parce qu'ils sont représentés comme sauvages. Présentés comme anormaux, comme ayant des difformités, ou ayant des moeurs particulières, comme les cannibales. La fascination est fondamentale pour expliquer le succès de ces zoos humains" commente Sandrine Lemaire, historienne et intervenante dans le documentaire.

Influencés par l'américain P.T. Barnum, célébrissime organisateur de plusieurs spectacles "ethnologiques" et d"exhibition de phénomènes, des hommes comme l'allemand Carl Hagenbeck (1844-1913) font fortune en organisant ces spectacles en Europe, dont Londres constitue, à cette époque, la capitale mondiale des zoos humains.

En 1906, la fortune d'Hagenbeck est telle qu'elle lui permet de financer sur ses propres fonds la construction d'un gigantesque zoo, à Hambourg, qui existe encore à ce jour. P.T. Barnum quant à lui continuera à importer régulièrement des populations jugées suffisamment exotiques, comme en 1883 où il fait venir tout un groupe d'aborigènes d'Australie, qui relevaient à cette époque, selon la terminologie officielle, "de la faune et de la flore"...

Ces zoos humains joueront un rôle très important dans l'affirmation de la puissance coloniale de la France et de la Grande-Bretagne. Il fallait faire connaître aux autres, à l'opinion, cette puissance impériale. Ces zoos humains constituaient ainsi pour les Autorités l'opportunité de faire "vivre" les conquêtes impériales à tous ceux et celles qui ne pouvaient pas voyager. Le jardin d'Acclimatation à Paris sera un des hauts lieux d'accueil de tous ces malheureux et malheureuses venus du bout du monde et des confins de l'empire.

Ils seront par la suite davantage mis en scène, lors des infâmantes expositions coloniales. L'exposition universelle de Paris en 1900 attirera plus de 50 millions de visiteurs, qui se presseront de découvrir les 80.000 exposants, avec détours obligatoires par le village africain reconstitué et peuplé de "cannibales"...

Au-delà du cas de P.T. Barnum, les Etats-Unis, en cette fin du XIXe - début XXe siècle, ne veulent pas rester à la périphérie des empires coloniaux européens. Eux aussi aspirent à étendre leur influence, et fonde un empire colonial en prenant l'île de Cuba à l'Espagne en 1898, puis les Philippines. En 1904, à la gigantesque exposition internationale qui se tient à Saint Louis, dans le Missouri, les Etats-Unis feront ainsi venir 1000 Igorots des Philippines. Du jamais vu. Durant cette exposition d'ailleurs, le célèbre chef Apache Geronimo sera lui aussi exhibé, dans un tipi...

Mais ce qu'affectionne le plus la communauté scientifique et la population d'alors, ce sont les pygmées du Congo, faisant partie de l'ethnie la moins civilisée de la planète estimait-on. Le département d'études anthropologiques de l'Université de Saint Louis passe ainsi commande à un fameux ancien missionnaire devenu explorateur, Samuel Philipps Verner, pour capturer quelques specimens et les placer dans un enclos durant cette exposition. Après être évidemment passés entre les mains des scientifiques, qui se pressent pour prendre sur eux toutes les mesures anthropométriques possibles.

Le cas du pygmée Ota Benga, exposé dans le documentaire, est porteur d'une charge émotive à fendre les pierres en deux. Après avoir été exposé durant dix ans aux États-Unis dans diverses manifestations internationales, culturelles ou scientifiques mais aussi dans des spectacles ethnographiques ou zoo humains, et même un mois durant dans le Zoo du Bronx, à New-York, il recouvra la liberté en septembre 1906, grâce à une campagne de protestation du public, indigné de le voir réduit dans un enclos du zoo.

Devenu libre, il est hébergé dans des orphelinats, où il y apprend l'anglais. Il trouve même un petit emploi dans une manufacture de tabac à Lynchburg, en Virginie. Libre, certes, mais profondément malheureux. Seul survivant de son clan, il comprend qu'il ne pourra jamais s'assimiler et s'épanouir au sein de cette population américaine; encore moins retourner un jour dans son pays d'origine. Au matin du 20 mars 1916, peu après être sorti de chez lui, il se tire une balle dans le coeur avec un pistolet qu'il avait emprunté. Il est enterré deux jours plus tard au cimetière public de Lynchburg, dans une tombe anonyme.

L'amorce du déclin des zoos humains commençera - et le regard porté sur eux - avec la Première guerre mondiale : les peuples coloniaux seront un important pourvoyeur de troupes dans la guerre. Combattants indochinois, tirailleurs sénégalais ou marocains, tous sont envoyés dans le chaudron d'une Europe à feu et à sang. Le général français Charles Mangin était d'ailleurs convaincu de la valeur des troupes sénégalaises. Il les trouvait non seulement endurantes au combat, mais en plus, elles faisaient peur aux allemands disait-il. Les allemands étaient désormais les nouveaux sauvages.

Dans les années 1920, le public se lasse de ces exhibitions et les autorités publiques souhaitent renouveler la forme de celles-ci, tandis que l'essor du cinéma, encore plus lorsqu'il deviendra parlant, capte désormais l'attention d'une population en mal d'exotisme. Les inégalités, les stéréotypes et le racisme seront désormais (mais pas seulement) fixés sur pellicule. Les zoos humains finissent par être interdits par l’administration coloniale dans l'entre-deux-guerres : Hubert Lyautey imposera la fin de toute exhibition à caractère racial dans le cadre de l'Exposition coloniale internationale de Paris en 1931.

Ce qui n'empêchera pas, ponctuellement, la tenue ça et là de ces exhibitions infâmantes, jusque dans les années 1950. Et même, pour prolonger, jusqu'en 1994 en France, avec cette ignoble atteinte à la dignité humaine que fut la création du village de Bamboula, dans une relative indifférence et amnésie de la société de l'époque, et avec la bénédiction des pouvoirs publics...

Pour une dépouille de Saartjie Baartman rendue avec les honneurs à sa terre natale, combien de restes de ces malheureux et malheureuses exhibés, disséqués au nom de la science, dorment encore dans les archives des musées à travers le monde, attendant que leurs pays d'origine ne réclament leurs dépouilles ? Des centaines, sûrement. Peut-être plus. Terribles et douloureux témoignages d'innommables souffrances, dont il appartient aux nouvelles générations "de sortir cette histoire de l'oubli pour apaiser les mémoires", lâche en guise d'épilogue cet exceptionnel et bouleversant documentaire.

"Sauvages, au coeur des zoos humains", diffusé ce mardi 5 avril à 20h55.

Disponible en replay sur Arte TV jusqu'au 3 juin 2022.