Un Américain, que rien ne distingue d'un autre, patiente interminablement dans l'habitacle de sa voiture individuelle, immatriculée «D-Fens», coincée dans un énorme embouteillage à Los Angeles. Il fait une chaleur torride. Une mouche bourdonne. L'homme comprend qu'il accumule un retard tel qu'il n'arrivera pas à temps pour l'anniversaire de sa fille. Pris de fureur, il quitte sa voiture et tente de faire le chemin à pied. Il ne tolère aucun obstacle. Il dévaste une épicerie, se bat avec des voyous, met la main sur un arsenal, mitraille à tous vents et ne laisse pas une cloison debout d'un fast-food. L'inspecteur Prendergast le prend en chasse. Une illustration au montage parfaitement maitrisé des contradictions et des violences tapies au coeur de notre civilisation.
"Que dire de Chute libre et son début parfaitement oppressant avec Michael Douglas en mode cocotte-minute coincé dans sa voiture ?, écrivait-on au moment de la disparition de son réalisateur, Joel Schumacher, en juin 2020. Le personnage, à l’image du propos, est border-line. On peut voir la chose comme un pendant wasp du Do the Right Thing de Spike Lee, sorti quatre ans plus tôt, soit le récit d’un pétage de plombs sous une chaleur insupportable. Racisme, rancœur, sueur, et une société américaine qui part à la dérive. C’est assurément le film qui restera au-dessus de la pile."
Trente ans après sa sortie, Chute Libre est à l'honneur sur Arte, dans le cadre d'une soirée spéciale Michael Douglas. Après la rediffusion de ce thriller également porté par Barbara Hershey et Robert Duvall, la chaîne proposera un documentaire inédit, et déjà visible en replay, intitulé Michael Douglas, l'enfant prodige.
Un portrait signé par Amine Mestari (Claude Sautet, le calme et la dissonance, diffué sur la même chaîne) au cours duquel le comédien et producteur américain se confie face caméra sur sa carrière. Il parle d'abord de son enfance, de ses débuts d'acteur dans l'ombre de son père Kirk, puis de son émancipation par la télévision via la série à succès Les Rues de San Francisco, et la production de Vol au-dessus d'un nid de coucou, qui a connu un succès phénoménal en 1976. Son propre triomphe en tant que comédien viendra deux décennies plus tard, grâce à Wall Street qui lui vaudra l'Oscar, et entre deux films remarqués, Michael Douglas évoque aussi sa vie personnelle, les déboires de son fils accro aux drogues ou son cancer de la gorge, dont il a parlé publiquement quand l'équipe de Steven Soderbergh l'a attendu pour pouvoir tourner ensemble Ma vie avec Liberace, il y a dix ans. Un documentaire touchant pour un artiste complet.
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