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13 avril 2022

Mort de Michel Bouquet

Michel Bouquet est décédé ce mercredi 13 avril à l'âge de 96 ans. Homme de théâtre qui fut sur les planches jusqu'à 91 ans, il était détenteur de deux César pour Le promeneur du Champ de Mars (2005) et Comment j'ai tué mon père (2001). Il avait décrit son amour du jeu d'acteur comme "une vocation qui ne vous lâche plus".

A 7 ans, Michel Bouquet est envoyé avec ses trois frères en pension, une expérience douloureuse pour cet enfant réservé qui doit affronter la cruauté de ses congénères. Alors que son père est fait prisonnier de guerre, il enchaîne ensuite les petits métiers : apprenti pâtissier, mécanicien-dentiste, manutentionnaire.

Un dimanche matin, alors que sa mère le croit à la messe, il se rend chez Maurice Escande, sociétaire de la Comédie-Française, qui lui propose de suivre ses cours. Intégrant le Conservatoire en compagnie de Gérard Philipe, il devient bientôt le comédien-fétiche de Jean Anouilh.

Grand acteur de théâtre, Michel Bouquet fait sa première apparition à l'écran en 1947 dans Brigade criminelle. Très tôt dirigé par des cinéastes prestigieux (Clouzot, Gance ou encore Grémillon), il devra toutefois attendre le milieu des années 60 pour s'imposer au cinéma.

Son goût pour l'ambiguité et son air austère en font un comédien idéal pour jouer les bourgeois inquiétants chez Chabrol, avec qui se noue une longue complicité (La Femme infidèle en 1968, Poulet au vinaigre).

Autre réalisateur Nouvelle vague, Truffaut le fera tourner à deux reprises : La Mariée etait en noir en 1967, puis La Sirene du Mississippi. Abonné aux rôles de salauds, l'acteur incarne un commissaire impitoyable dans Deux hommes dans la ville, un redoutable patron dans Le Jouet, la première comédie de Veber, ou encore Javert dans Les Misérables d'Hossein en 1981.

Michel Bouquet, qui a toujours confié qu'il préférait le théâtre au cinéma, se fait plus rare sur les écrans à partir des années 90. Ses compositions, d'une infinie subtilité, n'en sont que plus marquantes : vieil homme qui réinvente son existence dans l'audacieux Toto le heros, premier opus du Belge Jaco van Dormael en 1990, il est le père indigne de Charles Berling dans Comment j'ai tué mon père d'Anne Fontaine, une composition glaçante qui lui vaut le César du Meilleur acteur en 2002.

Après avoir proféré avec gourmandise (sur les planches puis devant une caméra) les insolents mots d'auteur de Bertrand Blier dans Les Côtelettes, il campe François Mitterrand au soir de sa vie dans Le Promeneur du Champ de Mars de Guédiguian, avec un mimétisme qui troublera jusqu'aux proches de l'ancien président.

On ne peut plus en forme à 85 ans, il livre une interprétation forte d'un homme de caractère qui ne veut pas mourir, et qui veut rester indépendant malgré sa santé défaillante dans La Petite Chambre, une coproduction franco-suisse.

En 2012, il revient au cinéma pour incarner Auguste Renoir devant la caméra de Gilles Bourdos, à un stade de sa vie où le peintre est au plus bas moralement, jusqu'à rencontrer Andrée Heuschling (Christa Théret), qui deviendra sa modèle. Il incarne également une autre figure, George Clémenceau, le temps d'un documentaire.

En parallèle, Bouquet poursuit le théâtre sur scène avec A torts et à raisons (2015-2016) et Le Tartuffe en 2017 à 92 ans. Il apparaît une dernière fois au cinéma en 2016 dans L'Origine de la violence d'Elie Chouraqui, pour reprendre un rôle de patriarche initialement prévu pour Michel Galabru, puis, cinq ans plus tard, dans le thriller Villa Caprice.