Une icône de la Blaxploitation et d'Hollywood s'est envolée. Richard Roundtree, inoubliable Shaft du polar de 1971, est décédé ce mardi 24 octobre, après un combat contre un cancer du pancréas. Âgé de 81 ans, le comédien avait marqué, par son statut, "un tournant pour les hommes afro-américains dans les films", selon un communiqué de son agent Patrick McMinn relayé par Variety, saluant "l'impact incontestable" d'une carrière allant de Shaft, les nuits rouges de Harlem à Shaft version 2019.
Samuel L. Jackson a réagi sur les réseaux sociaux pour honorer "le prototype", et lui témoigner son admiration. "Son décès laisse un trou profond non seulement dans mon cœur, mais dans les vôtres aussi j'en suis sûr. Je t'aime, mon frère, et je te vois marcher au milieu de la rue principale du Paradis avec Isaac dirigeant ta chanson".
Son jeune partenaire dans le Shaft de 2019, Jessie T. Usher, a lui aussi tenu à partager son admiration pour celui qui lui a appris "beaucoup de choses, mais surtout l'humilité et la gratitude" et à saluer la mémoire d'un homme "absolument légendaire".
Après des études dans une université d'Illinois, qu'il intègre en tant que joueur de football américain, Richard Roundtree se lance d'abord dans une carrière de mannequin avant de se tourner vers le cinéma. Ce sera d'abord dans Que diriez-vous à une femme nue ? de Allen Funt, comédie documentaire sur la nudité.
Le succès viendra quelques années plus tard : il endosse le costume d'un flic aux méthodes musclées, John Shaft, et redéfinit les codes de la coolitude devant la caméra de Gordon Parks. Nous sommes en 1971, la blaxploitation est alors à son apogée, et le personnage connaît un véritable triomphe (12 millions de dollars de recettes aux Etats-Unis, près de 600 000 entrées en France), porté par la chanson cultissime de Isaac Hayes.
Richard Roundtree reprendra son rôle dans deux films, Les Nouveaux exploits de Shaft (1972) et Shaft contre les trafiquants d'hommes (1973), et même dans une série télé qui ne dure que sept épisodes. Mais le succès n'est plus le même, et la blaxploitation touche à sa fin.
A ce propos, il déclarait au New York Times en 2019 avoir "eu le privilège de travailler avec l’homme le plus chic que j’aie jamais connu dans l’industrie, Gordon Parks. Donc, ce mot, exploitation, je m’offusque de tout attachement à Gordon Parks. J'ai toujours considéré cela comme négatif. Exploitation. Qui est exploité ? (...) Mais cela a donné du travail à beaucoup de gens. Cela a permis à beaucoup de gens d'accéder au secteur, y compris à un grand nombre de nos producteurs et réalisateurs actuels. Donc, dans l’ensemble, je considère cela comme positif".
Cette page tournée, Richard Roundtree aura ensuite du mal à se défaire de son personnage culte. Il continue néanmoins de tourner dans des films à plus petit budget, en reprenant souvent son rôle fétiche, comme dans One down, two to go ou Kill Point, connaissant plus ou moins de succès, au cinéma et à la télévision.
Icône des années 70, Richard Roundtree est redécouvert vingt ans plus tard par une jeune génération de fans. Il reçoit de nombreux prix, et participe à des projets ambitieux, tel le Seven de David Fincher, un rôle savoureux dans George de la jungle ou Speed Racer des Wachowski. Clin d'œil, il reprend son personnage culte pour jouer l'oncle du nouveau Shaft, joué par Samuel L. Jackson dans le remake de John Singleton en 2000... et la première génération de Shaft face à ce même Samuel L. Jackson et Jessie T. Usher dans la nouvelle version de 2019.
Richard Rountree multiplie également les apparitions sur petit écran et participe à quelques séries de renom : il s'illustre ainsi dans Alias, Desperate Housewives, Grey's Anatomy, Heroes, Mentalist, Chicago Fire ou L'Arme Fatale, avec des rôles récurrents dans Diary of a Single Mom et Being Mary Jane.