R. Kelly, connu dans le monde entier pour son tube I Believe I Can Fly, est apparu silencieux, parfois la tête baissée, au premier jour de son procès dans la salle d’audience du tribunal fédéral de Brooklyn (New York) où il est jugé pour extorsion, exploitation sexuelle de mineure, enlèvement, corruption et travail forcé, sur une période allant de 1994 à 2018.
Selon l’acte d’accusation, R. Kelly, vainqueur de trois Grammy Awards en 1998, dirigeait un réseau qui recrutait et préparait des jeunes filles à avoir des relations sexuelles avec lui, les enfermant dans leurs chambres d’hôtel quand il était en tournée, leur demandant de porter des vêtements amples quand elles n’étaient pas avec lui, de « garder la tête baissée » et de l’appeler « papa ».
La première victime présumée appelée à témoigner à la barre par le bureau du, identifiée sous le nom de Jerhonda, a ainsi affirmé que le chanteur filmait des relations sexuelles alors qu’elle n’avait que 16 ans, soit en dessous de l’âge du consentement aux Etats-Unis. La femme âgée de 28 ans a expliqué que R. Kelly lui avait dit qu’il allait la « former pour le satisfaire sexuellement ».
« Nous parlons d’un prédateur (…). Un homme qui, pendant des décennies, a utilisé sa célébrité, sa popularité et un réseau de personnes à sa disposition pour cibler, préparer et exploiter des jeunes filles, garçons et femmes pour satisfaire ses envies sexuelles », a lancé, à l’ouverture des débats, la procureure Maria Cruz Melendez devant l’accusé, costume gris, cravate violette.
Elle a décrit un système dans lequel R. Kelly aurait utilisé de « toutes les techniques du prédateur » pour approcher les mineurs, mais aussi utilisé son entourage, gardes du corps, chauffeurs, avocats, comptables, pour se protéger, à coups de menaces notamment.
S’il est reconnu coupable de toutes les accusations par le jury, sept hommes et cinq femmes sélectionnées la semaine dernière, R. Kelly, actuellement en détention provisoire, risque de 10 ans à la prison à vie.
Le chanteur a plaidé non coupable de l’ensemble des faits qui lui sont reprochés. « Vous allez entendre toute l’histoire dans son ensemble et justice sera rendue », a promis l’une ses avocats, Nicole Blanker.
Devant le tribunal, elle a soutenu que toutes les relations sexuelles étaient « consenties ». « Il n’a recruté personne… C’étaient des fans, qui venaient vers lui », a déclaré l’avocate.
Pendant plus de 25 ans, le chanteur originaire de Chicago, à la voix teintée d’influences gospel et aux textes et postures hypersexualisés, avait connu la scène R & B malgré une réputation sulfureuse, parce qu’il s’entourait de très jeunes filles et des accusations d'abus sexuels. Mais il avait continué de faire carrière, à coups de règlements à l’amiable. Un procès en 2008 pour pédopornographie s’était terminé par un acquittement.
Ce n’est qu’en janvier 2019, lors de la sortie de la série documentaire Surviving R. Kelly, que l’étau judiciaire s’est vraiment resserré. Désormais, le chanteur est inculpé dans quatre procédures instruites dans trois États (Illinois, New York, Minnesota).
L’identité des victimes n’a pas été révélée par le tribunal de New York mais parmi elles figure la chanteuse Aaliyah, décédée il y a vingt ans dans un accident d’avion, à 22 ans.
L’acte d’accusation reproche à R. Kelly d’avoir corrompu un fonctionnaire de l’Etat de l’Illinois en 1994 pour obtenir de faux documents et épouser une mineure. Une accusation qui renvoie au mariage, finalement annulé, du chanteur avec la jeune étoile du R & B. Elle avait alors 15 ans. Selon l’accusation, R. Kelly voulait se marier avec elle pour l’empêcher de témoigner contre lui parce qu’il l’aurait mise enceinte.
La procureure a également évoqué le cas de Sonia, 22 ans à l’époque des faits, en 2003, stagiaire dans une radio qui espérait obtenir une interview du chanteur après l’avoir rencontré à Salt Lake City. Selon l’accusation, la jeune femme avait été annoncée à Chicago, où elle avait été enfermée dans une pièce pendant trois jours et avait été abusée sexuellement par le chanteur, puis menacée pour qu’elle ne parle pas.
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