Les mots blessent, mais la justice entend bien ne pas les laisser impunis. Ce mercredi 5 juin, treize individus proches de la mouvance identitaire étaient jugés à Paris pour avoir visé Aya Nakamura avec des injures racistes, à la suite des rumeurs sur sa participation à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024. Face à la gravité des faits, des peines de 4 mois de prison avec sursis à 4 mois ferme ont été requises.
La chanteuse, qui n’était pas présente à l’audience, a été au cœur d’une attaque ciblée. Pour la procureure, le but était clair : “empêcher cette chanteuse française de participer à la cérémonie” en raison de ses origines. Des propos “haineux”, une action “discriminatoire” – autant de mots lourds de sens qui traduisent bien la volonté de la justice de marquer le coup. “Il s’agissait de discriminer et injurier cette chanteuse en raison de ses origines maliennes”, a-t-elle insisté, réclamant des “sanctions fortes et sévères”. Verdict le 17 septembre prochain.
Ils étaient treize sur le banc des accusés, mais seulement trois ont daigné se présenter au procès. Parmi eux : une ex-collaboratrice de députés RN, Capucine C., 22 ans, et Stanislas T., 24 ans, porte-parole du groupuscule Les Natifs, comme rapporté par Le Parisien. Tous ont refusé de répondre aux questions du tribunal, préférant lire un communiqué pour défendre leur action. “Ce qui se joue aujourd’hui, c’est la question de la liberté d’expression”, a lancé Stanislas T., costume impeccable et discours bien rodé… ou pas !
Car derrière ces grands mots, c’est une idéologie bien sombre qui se cache. Les Natifs, issus de Génération identitaire (dissous en 2021), se revendiquent d’une pensée raciste et complotiste. Et la fameuse théorie du “grand remplacement” n’est jamais loin dans leur discours. Les mis en cause, âgés de 20 à 31 ans, sont poursuivis pour provocation publique à la haine ou à la violence en raison de l’origine ou pour complicité. Un procès symbolique, qui dépasse le simple cas d’Aya Nakamura.
Retour en mars 2024. Alors que la participation d’Aya Nakamura à la cérémonie d’ouverture des JO fait l’objet de rumeurs persistantes, le groupuscule proche de l'extrême droite, Les Natifs, publie une photo sur X qui choque. On y voit une banderole tendue sur l’île Saint-Louis à Paris : “Y a pas moyen Aya, ici c’est Paris, pas le marché de Bamako”. Un message raciste qui détourne les paroles de son tube Djadja, et vise sans ambiguïté ses origines.
La publication est virale : plus de 4,5 millions de vues. Le compte des Natifs enfonce le clou, déplorant de “remplacer l’élégance française par la vulgarité” et d’ "africaniser nos chansons populaires”. SOS Racisme et la Licra alertent les autorités. Une enquête est ouverte, et Aya Nakamura elle-même porte plainte le 20 mars. Face à ce torrent de haine, l’artiste a choisi de se défendre. Mieux encore, elle se produira quelques mois plus tard lors de la cérémonie d’ouverture, reprenant à la fois ses propres hits et un grand classique de la chanson française de Charles Aznavour. Grande classe.







