De Alien à Avatar, en passant par Gorilles dans la brume, L'année de tous les dangers, Working Girl ou SOS fantômes, pour ne citer qu'une poignée de films, Sigourney Weaver a largement montré qu'elle est une grande actrice, n'ayant, depuis longtemps, plus rien à prouver. La comédienne, qui s'apprête à recevoir à la Mostra de Venise un prix saluant sa carrière, a accordé un long entretien au site Deadline. Et d'évoquer dans la discussion Alien 3, le film maudit de David Fincher.
"Je sentais que David devait téléphoner [aux executives de la Fox] et se battre tous les jours pour que nous puissions filmer ce qu'il voulait le lendemain. Et je suis désolée qu'il n'ait pas eu l'occasion de s'approprier le scénario avant de commencer. Cela rend la réalisation de films très difficile.
Je me souviens que le scénario original de Vincent Ward parlait de moines dans un monastère et que Ripley était dans le coma pendant la moitié du script. J’ai donc vivement ressenti le manque de support du studio.
C’était un moment de transition où les studios ont cessé de se concentrer sur "faisons de grands films" et ont commencé à se concentrer sur "ne perdons pas d’argent". Ils ont eu la bonne idée de mettre David Fincher à bord pour son premier film, mais ne pas le soutenir était très stupide. Cela nous a aidé à tourner en Angleterre afin que nous puissions avancer dans une certaine mesure.
Elle ajoute : J’ai entendu [...] que David a renié le film et j’en suis désolée, car j’ai adoré travailler avec lui et je pense que nous avons fait un bon film. Je suis contente qu’il ait eu une chance de faire sa version". Une allusion ici au fait que Fincher a refusé de se replonger dans Alien 3, laissant le champ libre pour une version Producer's Cut, dotée de 30 minutes supplémentaires par rapport à la version salle du film, qui dure 114 minutes.
Première réalisation pour Fincher, venu de l'univers de la publicité et des clips, l'expérience Alien 3 s'est effectivement révélée des plus douloureuses pour le cinéaste, comme le montre l'extraordinaire documentaire Wreckage & Rage : the Making of Alien 3 (disponible en version longue sur le Bu-ray), qui revient sur la production chaotique du film, les mésententes entre les producteurs et les scénaristes, les patrons du studio, et le réalisateur, parachuté à la tête d'un nouveau volet d'une saga qu'il admire pourtant plus que tout.
Mais il a aussi l'arrogance de sa jeunesse et du milieu duquel il vient. La Fox comptait sur son inexpérience cinématographique et une certaine docilité de sa part. Fincher quant à lui souhaitait aussi marquer de son empreinte ce nouveau volet de la saga, et se hisser selon ses propres termes au niveau des deux précédents opus.
"Nous avons débuté les prises de vues avec seulement quarante pages de scénario" dira-t-il plus tard, l'une des très rares fois où il acceptera d'évoquer le tournage; "les modifications nous parvenaient à un rythme tel que le lendemain de la réception des pages sur notre fax, nous mettions les scènes en boîtes. C'était de la démence".
A l'issue de la projection test du film d'ailleurs, les pontes de la Fox furent pris de panique. La major ordonna à Fincher de faire des reshootings. Mais, même avec cela, et devant le désastre annoncé ou attendu, le studio remonta le film dans le dos de l'apprenti cinéaste.
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