Sorti au cinéma le 24 avril dernier, Frères nous raconte l'histoire vraie de deux petits garçons de 5 et 7 ans, Michel et Patrice. Abandonnés par leur mère en 1948, ils s'enfuient dans la forêt. Ces derniers vont y survivre pendant sept années et tisser un lien qui les unira à jamais.
Pour réaliser ce film, le metteur en scène Olivier Casas s'est basé sur le récit de Michel de Robert, qui aurait donc survécu avec son frère dans la forêt durant les années 1950. Dans une enquête parue dans le journal Sud Ouest, cette histoire a été remise en cause, suscitant une polémique.
Les deux frères auraient survécu près des Boucholeurs, ancien village ostréicole située sur la commune de Châtelaillon, en Charente-Maritime. Selon l'enquête de Sud Ouest, plusieurs incohérences majeures viennent remettre en cause cette histoire, notamment concernant la chronologie des faits.
D'après le journal, Olivier Casas a contacté une Rochelaise spécialiste de la présence américaine en Charente-Maritime, en vue de la préparation du long-métrage. Nous étions alors en 2020. Relativement incrédule, cette personne repère assez rapidement des problèmes dans la chronologie des événements, notamment la présence d'une base américaine qui a été implantée en 1956 et non en 1951, ne collant pas avec les faits.
Elle fait part de ses doutes à l'équipe du film ; pour elle, ce récit ne tient pas debout. "Je suis diplomate, donc je leur dis que ce n'est pas compatible. Mais ils n'ont pas tenu compte de mes arguments. Ils avaient envie d'entendre ce qui les arrangeait. Et ce que je leur disais ne leur convenait pas", a-t-elle souligné dans les colonnes de Sud Ouest.
La production continuera donc le travail sans l'aide de cette personne. Par ailleurs, toujours selon le journal, "personne n'a entendu parler d'une telle aventure aux Boucholeurs." De plus, "quelle est la probabilité que deux enfants âgés de 5 et 7 ans survivent dans un bois pendant autant d'années ?" Aucune, estiment les spécialistes de la survie contactés par Sud Ouest. Du reste, comment personne n'a pu les remarquer pendant autant de temps ?, s'interroge-t-on dans la région.
Le média a pu s'entretenir avec le réalisateur, Olivier Casas, qui défend sa vision. "Il faut être clair, je n'ai pas réalisé un documentaire. C'est une histoire inspirée de faits réels et il y a des scènes qui vont et viennent au gré de la production. Nous avons fait l'impasse sur certaines parties pour des questions financières et de temps", explique le cinéaste.
"Je n’ai pas eu les moyens financiers de tourner à la base américaine. J’avais fait le repérage au musée de l’aviation à Rochefort et l’association était prête à sortir les avions. C’est la mort dans l’âme qu’on n’a pas reconstitué l’entrée dans Croix-Chapeau. Ce n’est pas un choix artistique mais de production. Le film fait donc l’impasse sur les petites aides reçues par les enfants", concède Olivier Casas.
"Michel de Robert a quand même des souvenirs de gens qui ont été moins durs avec eux, qui ont pu les aider. Mais le projet du film n’a pas été de vouloir durcir leur vie. La dimension spectaculaire de leur survie, ça n’a jamais été mon moteur et celui de Michel non plus", ajoute le metteur en scène.
Ce dernier, qui connaît Michel de Robert depuis plus de 20 ans, croit au récit de son ami. Pourquoi personne n'a remarqué la présence des deux frères ? Selon le cinéaste, "ils ont été certainement aperçus mais tout le monde s'en foutait parce qu'il y en avait d'autres. Michel et Patrice ont été aperçus par plein de gens qui ne se sont pas posé de questions", indique Olivier Casas.
Le réalisateur estime avoir "assez d'éléments de vérification, de gens qui corroborent cette histoire pour n'avoir aucun doute sur la véracité des faits." De son côté, Michel de Robert s'est dit très blessé par cette polémique : "C'est fou, déjà à l'époque on n'existait pour personne et, là, on est en train de nous dire qu'on a pas existé, qu'on n'a même pas été aux Boucholeurs, de nous effacer une nouvelle fois."
Frères, porté par Mathieu Kassovitz et Yvan Attal, a rassemblé plus de 500 000 spectateurs depuis sa sortie. Noté 4,1 par les spectateurs AlloCiné, le drame signé Olivier Casas a été très apprécié, malgré la polémique sur les libertés prises sur les faits réels. Si vous souhaitez vous faire votre avis, le film est toujours à l'affiche au cinéma.